[Extrait de l'Edition 142]
Quand il était enfant, Shoueb Mamjee passait des heures à fabriquer des « canots raphia », sorte de petites pirogues en bois qu’il fait naviguer sur le lagon de son village natal, Mahébourg. Cette activité qui réunissait auparavant enfants et adultes lors de superbes journées de régates, a été quelque peu délaissée au fil des années. Et pourtant, les petites régates ont repris vie depuis peu.
Shoueb Mamjee et son ami Jean-François Marday observent, ce jour-là, un jeune garçon en train de fabriquer un petit bateau en polystyrène et plastique avant de le mettre à l’eau. « À notre grand étonnement nous n’avions pas vu cela depuis fort longtemps. »
Les deux amis décident alors de créer le club« canot raphia » pour que les grands puissent revivre leur enfance et qu’en même temps, les jeunes du village connaissent cette tradition et puissent faire une activité qui leur permette d’acquérir des compétences tout en s’amusant. « À Mahébourg, il n’y a pas grand-chose comme activités, c’est une chance qu’on ait la mer ! »
C’est avec les anciens du village que Shoueb apprend à fabriquer ces « canots raphia » à la sortie des classes alors qu’il n’avait que 11 ans. En les regardant faire, et après plusieurs essais, il fabrique lui- même ses petites pirogues. À l’époque, il n’y avait pas les mêmes outils qu’aujourd’hui, les voiles étaient faites avec des sacs en plastique et le mât était en bambous. Maintenant, ils utilisent d’anciennes voiles de kitesurf pour les voiles et le mât est confectionné avec des morceaux de cannes à pêche récupérés, en carbone. La peinture, elle, se fait au moyen d’une bombe aérosol.
De nombreux barreurs, ceux qui tiennent la barre du gouvernail dans une embarcation, font leurs premières armes avec des « canots raphia », nous explique Shoueb, car ceux-ci réagissent comme de vrais bateaux et naviguent en fonction du vent. « Il faut aussi pouvoir courir dans l’eau pour contrôler le bateau avec le gouvernail. Durant les régates, on voit des gens de tous âges courir dans l’eau, se fatiguer, tomber, se relever. Le plus important, c’est de passer un bon moment, tous ensemble. »
Shoueb raconte que, lorsqu’il était enfant, il y avait souvent des régates de petits bateaux mais il y avait surtout beaucoup plus d’ambiance ; les gens le faisaient pour le plaisir et, après la régate, tout le monde se rejoignait pour prendre un verre ensemble. « Aujourd’hui, les jeunes veulent des prix lors des compétitions, ils sont moins enclins à participer uniquement pour le plaisir. Mais nous voyons toujours de belles choses comme ce petit garçon qui avait remporté Rs 200 et les a dépensées en achetant des friandises pour partager avec ses amis qui avaient participé à la régate. » Il faut croire que les « canots raphia » ont toujours ce pouvoir de réunir les gens de la région…