Témoignages
Le 20 janvier dernier, le monde de la restauration perdait un de ses plus grands chefs, Paul Bocuse. Surnommé le pape de la gastronomie française, il était pourtant un homme d’une simplicité et d’une modestie extraordinaires. C’est ce que déclarent tous ceux qui l’ont connu ou seulement rencontré comme ces deux Mauriciens passionnés de cuisine, Jean-Claude Hein et Mooroogun Coopen.
Jean-Claude Hein n’est pas chef mais un chimiste passionné de cuisine. Il a beaucoup bourlingué et, c’est alors qu’il travaillait à Johannesburg en 1987, qu’il eut l’occasion de rencontrer Paul Bocuse. Outre son travail, il était également pigiste à Radio RSA, une radio internationale sur ondes courtes qui diffusait dans le monde entier. Jean-Claude Hein animait des émissions en français et en anglais sur la science et la cuisine principalement. Quand Alain Bocuse vient en Afrique du Sud, à l’invitation de Southern Sun, il lui est demandé de faire son interview et d’être son interprète pendant son séjour à Johannesburg lors de ses différents déplacements.
« J’ai bien évidemment accepté. C’était une occasion de le connaître, de parler de beaucoup de choses, de la cuisine, créole surtout, mais aussi sud-africaine. Il était d’une simplicité et d’une modestie extraordinaires. Il aimait le cari et le goût épicé de la cuisine créole qu’il avait connue aux Antilles ».
Suite à leur rencontre, les deux hommes ont continué de correspondre pendant quelque temps, et notamment sur le projet de livre de la cuisine mauricienne que préparait M. Hein grâce au livre de recettes de sa grand-mère. « J’ai toujours voulu sauver ce patrimoine et Bocuse s’est intéressé à mon projet. C’est ainsi qu’il a accepté de préfacer le livre, Deux siècles de cuisine mauricienne ».
Cette volonté d’aider les autres dans la promotion de la culture culinaire, Mooroogun Coopen, en témoigne également. Devant se rendre à Lyon pour le Salon de l’hôtellerie et de la restauration (SIRHA) 2015, le chef exécutif de l’hôtel Le Canonnier et président de la Mauritius Chefs Association, devait, avec l’aval de son board, aller demander à Paul Bocuse d’accepter de devenir membre d’honneur de l’association. Le 28 janvier 2015, il se rend à l’Auberge du Pont de Collonges, restaurant de Bocuse à Lyon, pour dîner et profite pour leur expliquer le projet d’intronisation du grand chef comme membre honorifique. « L’accueil du personnel a été extraordinaire et j’ai eu droit à un menu dégustation. Le soir même, rendez-vous était pris pour le lendemain à 8 heures ».
Pour le chef Coopen, cela ne pouvait mieux tomber car c’était le jour de son anniversaire. « Je suis arrivé une demi-heure avant et j’ai patienté dehors dans la neige. Il est arrivé à l’heure convenue et m’a reçu tout de suite alors qu’il y avait trois autres chefs venus des ÉtatsUnis, de la Finlande et de la Suède qui attendaient également. Nous avons pris le petit-déjeuner ensemble et discuté de plusieurs projets pour aider les chefs mauriciens. C’est ainsi qu’il nous a proposé de faire venir le scientifique culinaire Nicolas Bré qui a effectivement animé un atelier de formation en mai de la même année à l’hôtel Le Canonnier pour 17 chefs mauriciens. Il reviendra encore deux fois par la suite. Il a permis également une coopération avec l’atelier Bocuse, et notamment avec le chef pâtissier Laurent Cordonnier qui a assuré une formation pour 15 chefs et qui devrait revenir en juin ou juillet de cette année là ».
« Cette rencontre a été mémorable et impressionnante en tout point. Rien que de manger dans son restaurant est une formation pour un chef. Tout semble parfait, juste, comme il faut. Je retiens de lui qu’il était un homme petit de taille mais imposant, une personne d’une sagesse extraordinaire qui méritait son titre de pape de la gastronomie ».