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Les sirandanes viennent probablement des devinettes posées par les griots africains avant de conter.

Sirandanes: devinettes « letan lontan »

Jadis, à l’époque où les écrans n’avaient pas encore envahi notre quotidien, les habitants des îles des Mascareignes se posaient de petites devinettes pour s’amuser. Pratique plutôt rare de nos jours, les sirandanes s’apparentent à des rites perpétués dans d’autres régions créolophones, comme les « tim-tim » aux Petites-Antilles.

D’où viennent les sirandanes ? Ces devinettes créoles étaient autrefois largement connues dans les îles créoles de l’océan Indien, et ailleurs sous d’autres noms. A l’époque de l’esclavage, elles étaient posées le soir, au coin du feu, par les conteurs en guise d’introduction. Une habitude semblable aux questions posées par les griots (conteurs) africains avant de conter, sorte de rite social qui commence toujours par une formule d’usage à laquelle doit répondre en cœur l’assistance.

Ces devinettes existent sous d’autres noms dans plusieurs pays créolophones. Ainsi, aux Antilles, on appelle ces devinettes des « tim tim », et en Guyane des « masak ». A Maurice, la formule d’introduction des sirandanes est « Sirandane ? », et la réponse d’usage est « Sampek ! ».

Voici quelques exemples d’ailleurs :

A la Réunion : « Kosa in soz ? » « Sirandane ! » (Variante : « Krike ? » « Krake ! »)

Aux Antilles : « Cric ? » « Crac ! » (ou « Et Cric ? » « Et crac ! »)

En Guyane : « Masak masak ? » « Kanm ! »

Sirandanes, de Jean-Marie et Jémia Le Clézio.

Sirandanes, de Jean-Marie et Jémia Le Clézio.

Les sirandanes ont trait à la vie quotidienne, à la nature, aux cultures et aux outils utilisés à l’époque. Par exemple : « - Trwa piti nwar get vant mama brile ? – Lipye marmitt » (« -Trois petits noirs regardent le ventre de leur maman brûler ? – Les pieds de la marmite »). Toujours très imaginatives, ces devinettes sont souvent poétiques, parfois pleines de sagesse, mais aussi grivoises de temps en temps.

Malgré l’éloignement géographique, certaines devinettes créoles classiques existent, sous différentes formes linguistiques, dans plusieurs anciennes colonies françaises. « -Dilo dibout ? – Kann ! » (« -De l’eau debout ? – Canne à sucre ! ») est ainsi connu dans toutes les îles où l’on pratique l’art de la devinette.

A Maurice, l’auteur Charles Baissac a compilé bon nombre de sirandanes en 1888 dans le recueil Le Folk-lore de l’île Maurice. Le prix Nobel de littérature Jean-Marie Le Clézio a également réalisé une très belle compilation de sirandanes mauriciennes, avec traductions françaises, dans l’ouvrage Sirandanes (1990).

Quelques exemples de devinettes créoles :

Maurice : « - Kat pat mont lao kat pat. Kat pat ale, kat pat reste ? – Lisyen mont lor sez ! » (« - Quatre pattes grimpent sur quatre pattes. Quatre pattes s’en vont, quatre pattes restent ? – Un chien qui grimpe sur une chaise. »).

Maurice : « - Bizin sous li fer li red avan mett li dan trou ? – Difil zeguiy ! » (« - Il faut le sucer pour le raidir avant de le mettre dans le trou ? – Le fil de l’aiguille ! »)

La Réunion : « - i manz par la tèt i rann par lo bra ? - Larozoir ! » (« - Il mange par la tête et il rend par le bras ? – L’arrosoir ! »)

Antilles : « - Tablié madam la déyé do a-y ? – Zong ! » (« - Le tablier de cette dame est dans son dos ? – L’ongle ! »)

Guyane : « - Mo ka ansent lakaz, mo ka akouché a danbwa ? – Fizi ! » (« - Je suis enceinte dans la case et j’accouche dans les bois ? – Un fusil ! »)

Photo: Les sirandanes viennent probablement des devinettes posées par les griots africains avant de conter.

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